La dissolution d’une société civile immobilière (ou SCI) n’est pas une formalité anodine. Comme toute société, elle exige une bonne connaissance des règles de liquidation. Que vous soyez gérant, associé ou simple observateur souhaitant comprendre la procédure, maîtriser les grandes étapes de cet événement permet d’éviter de nombreuses erreurs et sanctions. C’est un point d’autant plus important qu’en 2025, la dématérialisation via le guichet unique est plus que jamais d’actualité.
Dans cette page, nous vous proposons un mode d’emploi clair et pédagogique pour dissoudre une SCI dans les meilleures conditions. Vous y découvrirez les motifs de clôture, les phases de la liquidation, les conséquences fiscales et l’avenir du patrimoine immobilier.
Quels sont les motifs de dissolution d’une SCI ?
Plusieurs motifs peuvent justifier la dissolution d’une SCI.
En premier lieu, la SCI prend fin lorsque la durée inscrite dans les statuts arrive à échéance sans prolongation. Ainsi, si une SCI est constituée pour 99 ans et que les associés ne se prononcent pas sur son éventuelle reconduction, la société se retrouve automatiquement dissoute à l’expiration de ce terme. Cette situation est un cas fréquent, car la plupart des SCI sont créées pour détenir et gérer un ou plusieurs biens immobiliers sur une longue période, mais les héritiers ou successeurs peuvent n’avoir aucun intérêt à prolonger la structure.
Deuxième cause : la réalisation ou la disparition de l’objet social. Pour une société civile immobilière, l’objet correspond généralement à l’acquisition et à la gestion de biens immobiliers. Mais lorsque tous les biens ont été cédés et que la société n’a plus d’activité, la dissolution peut s’imposer naturellement. De même, si l’activité devient impossible (par exemple, en cas d’expropriation totale ou de changement de code rendant l’objet illégal), la SCI perd sa raison d’être et se dissout de plein droit. Les statuts peuvent d’ailleurs prévoir des clauses spécifiques pour une dissolution anticipée.
Et puis, la décision collective de l’assemblée des associés permet également de dissoudre la SCI. Les associés motivent souvent leur décision par un projet de vente du patrimoine, un regroupement d’entreprises, ou encore pour éviter les contraintes administratives d’une structure jugée inutile.
En dehors des conditions prévues par les statuts ou la loi, la dissolution peut aussi découler de conflits majeurs entre associés. Dans une structure civile, une mésentente grave bloque la gestion au point de rendre impossible la poursuite de l’activité. Si la médiation échoue, un associé peut saisir le tribunal pour demander la dissolution judiciaire de la SCI. C’est évidemment une issue lourde de conséquences, puisque le juge va analyser le dossier et, en cas de constat que la poursuite de la société est compromise, prononcer la fermeture de manière forcée.
Par ailleurs, des difficultés financières importantes, notamment des dettes insurmontables, conduisent inévitablement à une faillite ou une liquidation judiciaire. Dans ce cadre, le tribunal nomme un liquidateur chargé de réaliser l’activité résiduelle, de régler les créanciers et de clore les comptes. Bien que la notion de redressement ou de faillite s’applique davantage aux entreprises commerciales, une SCI peut parfaitement se retrouver dans l’obligation de dissoudre pour solder ses dettes et procéder à la radiation.
Bien entendu, il peut aussi y avoir des motifs externes, comme la perte totale de patrimoine (expropriation, sinistre non indemnisé, etc.) ou des évolutions réglementaires majeures qui précipitent la dissolution de la SCI.
Quelles sont les étapes de la dissolution d’une SCI ?
Vous vous en doutez, la dissolution d’une SCI suit un certain nombre d’étapes précises.
La première étape consiste à entériner la décision de mettre fin à la SCI. Les associés doivent se réunir en assemblée générale extraordinaire, dans le respect des règles de convocation prévues par les statuts (envoi d’un avis, délai de convocation, lieu de réunion généralement fixé au siège social, etc.). Durant cette assemblée, le gérant et les associés évoquent les raisons qui motivent la fermeture de l’entreprise : fin de l’objet social, perte d’intérêt économique, volonté de récupérer les parts, ou tout autre motif légitime.
La dissolution doit ensuite être rendue publique via une publication dans un journal d’annonces légales ou un service de presse en ligne habilité. Cette formalité existe pour informer les partenaires, les créanciers et l’administration de la cessation en cours. L’annonce doit comporter plusieurs informations clés : la raison sociale de la SCI, l’adresse de son siège, la date de la décision, le nom du liquidateur, l’objet de la société, etc.
Bon à savoir : Une fois l’annonce parue, le support de publication vous remettra une attestation de parution. Ce justificatif est nécessaire pour constituer le dossier à transmettre au guichet unique.
En guise de troisième étape, le liquidateur nommé durant l’assemblée générale extraordinaire qui a voté la dissolution (choisi parmi les associés ou tiers de confiance) a pour mission d’ouvrir la liquidation. Il gère tout le processus jusqu’au bout, du recouvrement des créances à la vente ou la répartition des biens immobiliers, en passant par le paiement des dettes et la supervision des opérations de clôture.
Une fois toutes les opérations précédentes menées (vente des immeubles, paiement des créanciers, etc.), le liquidateur arrête les comptes de la SCI. Si le solde est positif, on parle alors de boni de liquidation que l’on répartit entre les associés au prorata de leurs parts (sauf disposition contraire dans les statuts). Si le solde est négatif, il s’agit d’un « mali ». Les associés doivent dans ce cas combler la différence.
À l’issue de la clôture des comptes, il reste à demander la radiation de la SCI. Pour ce faire, le liquidateur constitue un dossier qui comprend :
- le procès-verbal de clôture de la liquidation ;
- les comptes définitifs approuvés par l’assemblée ;
- l’attestation de publication de l’annonce légale ;
- le formulaire de radiation (M4) dûment complété et signé.
Une seconde annonce légale est alors publiée pour informer de la radiation. Une fois le dossier déposé au guichet unique des formalités, la société est officiellement rayée des registres.
Quelles conséquences fiscales lors de la dissolution d’une SCI ?
La dissolution d’une SCI équivaut à une cessation d’activité sur le plan fiscal. Le passage en liquidation entraîne donc une série de déclarations et formalités juridiques qu’il convient d’anticiper. En 2025, les règles fiscales relatives aux sociétés civiles immobilières n’ont pas fondamentalement changé, mais la dématérialisation des déclarations s’est généralisée, ce qui simplifie partiellement la procédure.
La déclaration de cessation et la fiscalité selon le régime
Dès que la décision de dissoudre la SCI est prise, le liquidateur doit transmettre une déclaration de cessation d’activité à l’administration fiscale. Ce document l’informe que la société arrête définitivement son exercice. Il faut alors régler la question des impôts.
Lorsque la SCI est soumise à l’impôt sur le revenu (IR), ce sont les associés qui déclarent directement leur quote-part de bénéfices (ou de déficit). En revanche, si elle est soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), c’est la société elle-même qui établit une dernière liasse fiscale jusqu’à la date de la dissolution.
Le traitement du boni de liquidation
Le boni de liquidation correspond à la somme (ou la valeur) qui reste après avoir réglé toutes les dettes de la SCI et restitué le capital social d’origine. Si cette somme est positive, elle est partagée entre les associés selon la répartition de leurs parts. Fiscalement, le boni est assimilé à une plus-value de cession de titres pour les associés-personnes physiques. Le barème d’imposition dépend alors des règles en vigueur (impôt sur la plus-value mobilière, prélèvement forfaitaire unique, etc.).
Attention, dans le cas d’une SCI soumise à l’IS, le boni peut être considéré comme un dividende. On applique alors le prélèvement forfaitaire unique (30 %) ou l’option pour le barème progressif (si l’associé remplit certaines conditions). Attention, il est vital de réaliser un calcul précis du boni pour ne pas se confronter à un redressement fiscal ultérieur. Les services fiscaux peuvent en effet exiger des justificatifs (valeurs d’acquisition, apports initiaux, dates d’entrée au capital, etc.) pour vérifier l’exactitude de la déclaration.
Les plus-values immobilières et la TVA
Quand la SCI détient un immeuble (ou plusieurs biens), sa revente avant la clôture de la liquidation peut engendrer des plus-values immobilières. Pour une SCI « transparente », ces plus-values sont imposées dans la catégorie des particuliers, avec un éventuel abattement selon la durée de détention. Pour une SCI à l’IS, la taxation suit les principes applicables aux sociétés commerciales (avec un taux global d’IS sur la plus-value). Il faut également vérifier si la société était assujettie à la TVA immobilière, ce qui peut venir complexifier le calcul.
À l’issue de la vente, le liquidateur répartit le produit net entre les associés. À ce stade, la SCI cumule éventuellement deux niveaux d’imposition : la plus-value lors de la vente du bien par la SCI et l’imposition personnelle sur le boni perçu, selon le régime fiscal appliqué.
Quel avenir pour le patrimoine après la dissolution de la SCI ?
La dissolution d’une société civile immobilière implique de décider du sort du patrimoine immobilier. Qu’il s’agisse d’un appartement, d’une maison individuelle ou d’un local professionnel, les associés peuvent souhaiter conserver leur bien, le vendre ou le transférer dans une autre structure. Si plusieurs scénarios se dessinent, chacun comporte son lot d’implications juridiques, fiscales et pratiques.
L’attribution directe du bien aux associés
La première option est d’attribuer le bien de la SCI à ses membres, en nature. C’est ce que l’on appelle le « partage en nature ». Les associés deviennent alors copropriétaires du bien en fonction de leurs parts dans le capital social. Cette solution évite une vente sur le marché et permet de continuer à profiter du bien (location, usage personnel, etc.). Toutefois, elle nécessite d’évaluer correctement la valeur du bien au moment de la liquidation.
Fiscalement, un partage en nature peut être traité comme une cession de parts sociales ou une répartition d’actif. Il faut donc étudier de près les conséquences en termes de déclaration et de droits d’enregistrement. Et si l’attribution du bien n’est pas prévue dans les statuts, une assemblée extraordinaire devra voter ce choix à la majorité requise.
La vente du bien et la distribution du produit
Dans le second scénario, la SCI vend l’immeuble avant de procéder à la clôture de la liquidation. Dans ce cas, le liquidateur se charge de trouver un acquéreur, de signer l’acte de vente et de régler l’ensemble des dettes. Le montant restant (après paiement des impôts, des frais et des autres charges) constitue le boni et se voit réparti entre les associés. Cette solution a l’avantage d’éviter l’indivision post-dissolution et de permettre à chacun de récupérer sa quote-part en argent sonnant et trébuchant.
Mais un inconvénient majeur subsiste avec les aléas du marché immobilier. Trouver un acheteur peut prendre du temps et repousser d’autant la clôture de la liquidation. Sans oublier que la plus-value potentielle sur la vente est imposée au niveau de la SCI (impôt sur la plus-value immobilière ou IS) et, en second lieu, sur l’associé qui pourra être taxé sur sa part du boni.
Le transfert à un associé ou à une nouvelle structure
Un troisième cas, plus spécifique, consiste en la cession du bien à un associé qui souhaite poursuivre l’activité ou en l’apport à une nouvelle entreprise. L’associé rachète le bien en son nom propre ou au profit d’une autre SCI, créée pour l’occasion avec de nouveaux statuts (parfois pour changer de régime fiscal ou accueillir de nouveaux partenaires). Ce type d’opération nécessite bien sûr d’être rigoureux. Le liquidateur agit pour le compte de la société, détermine le prix de cession, rédige un acte de vente, puis intègre le montant dans les comptes de liquidation. Il faut ainsi s’assurer que la transaction est réalisée à la valeur réelle du marché, et ce, pour éviter tout soupçon d’abus ou de dissimulation du prix.
Ce qu’il faut retenir, c’est que la dissolution d’une SCI ne s’improvise pas. Si elle peut être motivée par plusieurs raisons, les formalités à accomplir sont quant à elles relativement strictes. Décision en assemblée, nomination du liquidateur, publication d’une annonce légale, clôture des comptes, puis radiation, c’est un événement sur lequel vous ne pourrez pas revenir. Mieux vaut donc être sûr de votre choix. Quant aux conséquences de cette dissolution sur le patrimoine, nous avons vu que ce ne sont pas les options qui manquent. Si vous vous sentez perdu, pensez à consulter un expert ou un juriste, car cet interlocuteur sera le plus à même de sécuriser la fin de vie de la SCI et le futur de ses associés.