Dans le labyrinthe complexe des aides de l’État à la création d’entreprise, distinguer celles qui sont attribuées par Pôle emploi (nouvellement nommé France Travail) peut s’avérer utile, surtout pour les jeunes créateurs d’entreprises. ARE, ARCE, ACRE ou NACRE, dans ce dédale d’acronymes parfois flous, les nouveaux entrepreneurs ont vite fait de se retrouver désemparés. Pourtant, certains de ces dispositifs sont des piliers conséquents de la création et de la reprise d’entreprise lorsque l’entrepreneur répond aux droits et exigences en vigueur, notamment en matière d’allocation chômage.
Pour vous permettre de mieux cerner ce à quoi vous avez droit avec votre projet, surtout si vous faites partie des demandeurs d’emploi désireux de se lancer dans la création d’une entreprise, nous vous proposons ce guide incontournable des aides de Pôle emploi – France Travail. Critères d’éligibilité, montants potentiels et implications sur votre statut social, découvrez des informations cruciales pour faire un choix éclairé et éviter les désillusions.
État des lieux des aides à la création d’entreprise de Pôle emploi – France Travail
Si vous êtes en plein projet de création ou de reprise d’entreprise et que vous avez déjà fait quelques recherches sur le Web, vous avez dû constater qu’il n’est pas toujours simple de savoir quelles sont les aides à la création d’entreprise réellement prises en charge par Pôle emploi – France Travail. Entre l’ARE, l’ARCE, l’ACRE ou le NACRE, certaines sources disent tout et son contraire, ce qui peut contribuer à créer un peu plus de confusion dans votre esprit.
Pour commencer, sachez que l’ARE, l’allocation d’aide au retour à l’emploi, et l’ARCE, l’aide à la reprise ou à la création de l’entreprise, sont bien deux dispositifs d’aides à la création d’entreprise gérés directement par Pôle emploi – France Travail. Pour bénéficier de ces allocations, vous devez donc inévitablement vous tourner vers cet organisme. Mais contrairement à une idée très répandue sur internet, l’ACRE, l’aide à la création ou à la reprise d’une entreprise, et le NACRE, le nouvel accompagnement à la création ou la reprise d’entreprise, n’entrent pas dans le cadre des services de Pôle emploi.
De son côté, l’ACRE est une exonération temporaire des cotisations sociales de l’entreprise, basée sur le chiffre d’affaires déclaré. Peu importe votre statut donc, cette aide dépend uniquement de l’Urssaf. Quant au NACRE, s’il a longtemps été sous le contrôle de l’État et du service public, il est désormais sous la responsabilité des régions et ne porte plus nécessairement ce nom. Chaque collectivité peut effectivement proposer son propre dispositif et ses propres modalités. Là encore, Pôle emploi – France Travail n’est pas impliqué.
Vous l’aurez compris, soyez vigilant lorsque vous faites vos recherches en vue d’un projet de création d’entreprise et n’hésitez pas à recouper plusieurs sources pour vérifier le sérieux des informations consultées.
L’ARE, l’allocation d’aide au retour à l’emploi
L’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) est un dispositif à destination des entrepreneurs involontairement privés d’emploi, qui facilite le maintien d’une rémunération pendant la phase initiale de mise en place et de création de leur entreprise. Néanmoins, cette allocation est soumise au respect de plusieurs conditions. On fait le point.
Quels entrepreneurs peuvent bénéficier de l’ARE ?
En premier lieu, il faut savoir que seule la privation involontaire d’emploi permet de bénéficier de l’ARE, et ce, quel que soit votre profil. Plus concrètement, la cessation de votre dernier contrat de travail doit découler :
- d’une démission légitime (par exemple, suivre votre mari ou votre partenaire muté) ;
- du non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée (CDD) ;
- d’une rupture conventionnelle ;
- d’un licenciement pour motif personnel, motif économique, ou révocation.
Attention, si vous refusez une proposition de réintégration de votre employeur, vous ne pouvez plus prétendre à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).
En plus de ces différents critères, vous devez également être physiquement apte à l’exercice d’un emploi, résider en France, maintenir votre inscription à Pôle emploi – France Travail comme demandeur d’emploi (en vous actualisant chaque mois une fois votre entreprise créée) et ne pas avoir déjà déposé une demande d’ARCE. Vous devez aussi ne pas avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite et avoir travaillé au moins 130 jours ou 910 heures au cours des 24 derniers mois (ou des 36 derniers mois pour les personnes de 53 ans et plus)
Concernant votre âge, sachez que certaines spécificités s’appliquent si vous avez moins de 53 ans, entre 53 et 54 ans, ou plus de 55 ans.
Quel est le montant de l’ARE ? Pour quelle durée est-elle versée ?
Si vous envisagez de vous lancer dans la création ou la reprise d’une entreprise, sachez que la base de calcul de l’ARE correspond à l’allocation chômage que vous auriez obtenue sans devenir entrepreneur, à laquelle 70 % du revenu brut mensuel généré par votre nouvelle entreprise est soustrait. Ensuite, en se basant sur vos revenus d’activité, votre agence Pôle emploi – France Travail détermine le nombre de jours éligibles à l’indemnisation. De manière générale, la durée pendant laquelle vous pouvez percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi, tout en développant votre entreprise, est la même que celle de vos droits initiaux.
Signalons que dans tous les cas, le total de vos revenus d’activité additionné à l’ARE ne doit pas excéder votre salaire brut précédent.
Illustrons notre explication avec un exemple qui vous aidera à y voir plus clair. Si vous aviez un salaire brut de 2 000 € mensuels, l’allocation mensuelle de l’ARE qui vous est due est de 53,35 € par jour (40,4% du salaire journalier brut + 12,95 € par jour), soit 1 600,5 € par mois (pour 30 jours). Mais si vos revenus d’activité vous permettent de toucher l’équivalent d’un salaire brut mensuel de 1 000 €, il faut alors déterminer le nombre de jours d’indemnisation concerné, soit :
- 1 600,5 – (70 % x 1 000) = 900,5 €
- 900,5 / 53,35 = 16,87 jours (arrondi au chiffre entier le plus proche).
Sur la base de ce calcul, vous pouvez donc être indemnisé à hauteur de 17 jours et percevoir 906,95 € (17 x 53,35) d’ARE, auquel s’ajoutent vos revenus d’activité de 1 000 €. Vous restez donc sous la limite de votre salaire brut précédent (2 000 €).
Bon à savoir : Pour les entrepreneurs individuels ou les micro-entrepreneurs qui règlent leurs cotisations sociales de manière trimestrielle, les revenus professionnels ne peuvent pas être immédiatement identifiés. Dans ce cas de figure, l’allocation accordée représente 70 % de l’allocation chômage mensuelle normalement due sans reprise d’activité. Elle fait l’objet d’une régularisation annuelle a posteriori. De plus, le calcul tient aussi compte de l’abattement forfaitaire pour charges et frais professionnels relatif au type d’activité (71 % pour l’achat-revente et la fourniture de logement, 50 % pour les prestations de services, ou 34 % pour les activités libérales).
Les formalités pour percevoir l’ARE
L’allocation d’aide au retour à l’emploi étant intrinsèquement liée à l’allocation chômage, vous devez évidemment être inscrit à Pôle emploi – France Travail pour en bénéficier de manière automatique. Ensuite, il vous suffit d’actualiser votre situation tous les mois, avec vos revenus, pour continuer à la percevoir jusqu’à la fin de vos droits.
L’ARCE, l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise
En parallèle de l’ARE, la création ou la reprise d’entreprise permet également de bénéficier de l’ARCE, une aide financière versée en deux fois maximum, qui prend la forme d’un capital des droits restants à l’allocation chômage de l’entrepreneur. Celle-ci vient donc remplacer le maintien partiel de l’ARE et représente également un soutien financier conséquent pour démarrer une entreprise sereinement. À noter que si vous choisissez de percevoir l’ARCE, vous ne pouvez pas cumuler ce dispositif avec l’ARE.
Quels entrepreneurs peuvent bénéficier de l’ARCE ?
Tout comme pour l’ARE, certaines conditions sont requises pour que les créateurs et repreneurs d’entreprise inscrits comme demandeurs d’emploi puissent en bénéficier. Bien entendu, vous devez avoir créé ou repris une entreprise en France après la fin de votre contrat de travail précédent. De plus, vous devez aussi répondre aux conditions d’accès de l’allocation d’aide au retour à l’emploi. Enfin, vous devez aussi bénéficier de l’ACRE, l’exonération partielle ou totale de vos cotisations sociales pendant un an.
Quel est le montant de l’ARCE ?
De manière générale, le montant de l’ARCE est égal à 60 % des droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) qui restent à verser au moment du début d’activité, auquel 3 % de participation au financement des retraites complémentaires sont déduits. Par exemple, si vous avez droit à une ARE de 906,95 € par mois et qu’il vous reste 6 mois d’indemnisation, le montant de votre aide est de 3 167,07 € (60 % de 5 441,7 €, auquel on soustrait 3 %).
Dans tous les cas, ne perdez pas de vue que l’ARCE est versée en deux fois : une première fois au début de votre activité (dès lors que vous répondez à l’ensemble des conditions d’attribution) et une seconde fois au bout de 6 mois d’activité (si vous êtes toujours à la tête de la même entreprise).
Par exemple, si votre capital de droits restant est de 15 000 €, le montant global que vous pouvez recevoir au titre de l’ARCE est égal à 9 000 €. Vous recevez alors deux versements de 4 500 € chacun.
Les formalités pour obtenir l’ARCE
Pour percevoir l’ARCE durant les premiers mois de développement de votre entreprise, vous devez déposer une demande auprès de votre agence Pôle emploi – France Travail. Cette dernière doit être assortie de différents documents justificatifs, à l’image d’une attestation de la création ou de la reprise d’une entreprise qui répond au dispositif ACRE (justificatif d’immatriculation, extrait Kbis, etc.).
ARE ou ARCE : quel choix pour les créateurs d’entreprise ?
Si vous répondez aux conditions de versement de l’ARE, vous êtes donc face à un choix essentiel : préférez-vous une indemnité mensuelle ou souhaitez-vous opter pour l’ARCE et ses deux versements ? Comment choisir entre ces deux dispositifs ? Loin d’être anodine, cette décision influencera votre statut social.
En effet, si vous choisissez l’ARE, vous conservez votre affiliation au régime général de la sécurité sociale, ce qui vous permet de continuer à accumuler des trimestres de retraite. Cependant, en cas de rémunération issue de votre nouvelle entreprise, la somme que vous recevez au titre de l’ARE se voit évidemment réduite (ce qui influence vos droits à la retraite).
À l’inverse, si vous vous tournez vers l’ARCE, vous vous détachez du régime général de la sécurité sociale et vous cessez d’accumuler vos trimestres de retraite. Malgré tout, vous pouvez profiter d’une année de prolongation de votre statut social dès lors que vous choisissez cette option. En contrepartie, l’ARCE vous permet de percevoir une rémunération (avec votre nouvelle entreprise) sans affecter le montant de l’allocation qui vous est due.
En d’autres termes, peu importe votre choix, tout dépend de vos besoins et de vos attentes, d’autant plus que sur le plan fiscal, l’ARE et l’ARCE sont toutes deux imposables en traitements et salaires sur la déclaration annuelle de l’impôt sur le revenu.
Vous êtes désormais mieux armé pour vous préparer à votre projet et lancer votre entreprise dans les meilleures conditions possibles. Et surtout, n’oubliez pas qu’en fonction de votre choix, ARE ou ARCE, vous profiterez d’avantages distincts, mais aussi de certains inconvénients, notamment en matière de statut social. Il est donc primordial que vous sachiez définir vos besoins et vous projeter sur les premiers mois, voire les premières années, de vie de votre nouvelle entreprise.