On vous a sûrement déjà vendu le rêve de la start-up qui lève des millions, du SaaS révolutionnaire ou du business model à la Silicon Valley, n’est-ce pas ? Mais pendant que tout le monde court après le dernier outil à la mode, des milliers d’entreprises françaises prospèrent discrètement dans l’ombre des projecteurs. Pas très sexy ni vraiment instagrammables, ce sont les « boring business« , un terme qui prend de plus en plus d’importance malgré son caractère péjoratif que je n’approuve pas du tout. En effet, ces sociétés incarnent sans aucun doute la meilleure opportunité de croissance, de rentabilité et de résilience qu’il est possible d’avoir en France, aujourd’hui.
Alors, bien sûr, je ne parle pas ici de refaire le monde, mais seulement de le faire tourner. Plomberie, maintenance, froid industriel, blanchisserie, ventilation, dératisation, climatisation, etc., attardons-nous sur ces activités que beaucoup regardent de haut… jusqu’à ce que leur confort en dépende. Vous allez le voir, l’idée du siècle en matière d’entrepreneuriat se trouve peut-être dans la création de valeur d’une entreprise déjà solide et ancrée dans le tissu économique.
Pourquoi le boring business n’a rien d’ennuyeux ?
Ce n’est pas parce qu’une entreprise ne fait pas la Une des Échos qu’elle est inintéressante. Bien au contraire. Un boring business coche souvent toutes les cases qu’un investisseur ou un bon dirigeant regarde : du cash-flow récurrent, une clientèle fidèle, des barrières à l’entrée et une forte demande locale. Nul besoin d’un gros coup de communication ou d’un budget marketing délirant pour faire tourner la machine ! Il faut juste un peu de rigueur, beaucoup de stratégie, une bonne équipe et un soupçon de bon sens.
En France, des milliers de TPE et PME dans ces secteurs sont en train de vieillir, avec des dirigeants qui approchent de la retraite et cherchent des repreneurs. C’est tout l’enjeu du marché des transmissions d’entreprises. Parce que oui, reprendre une entreprise, c’est souvent plus rapide et plus sûr que de lancer une start-up à l’avenir incertain.
Pour beaucoup, la vraie croissance, qui repose sur des flux maîtrisés et une rentabilité prouvée, se joue désormais dans ces entreprises où l’exécution compte plus que le pitch devant les investisseurs.
Un terrain fertile pour les entrepreneurs malins
Vous cherchez un plan pour monter votre boîte ? Pourquoi ne pas viser une TPE ou une PME bien rodée, avec des clients réguliers, une bonne réputation et un manque de digitalisation ? Dans beaucoup de ces sociétés, il suffit d’un peu de marketing, d’un site Web efficace et d’un CRM pour doubler le chiffre d’affaires en quelques années.
Je vois souvent passer des entrepreneurs sur les réseaux à la recherche de l’idée parfaite. Sauf que ce n’est pas l’idée qui fait la valeur ! C’est la gestion, l’exécution, ainsi que la capacité à structurer et à répéter cette boucle dans le temps. Dans un boring business, vous avez des procédures, une saisonnalité, des marges connues et une équipe déjà opérationnelle. Ce n’est pas un terrain vierge ! Le moteur est déjà en route et vous n’avez plus qu’à le faire monter en régime.
Et puis, ces entreprises résistent mieux aux crises. Le jour où l’économie vacillera, ce ne seront pas les logiciels d’IA générative qui tiendront le pays debout, mais bien les professionnels qui répareront les fuites, qui assureront la chaleur en hiver, qui garantiront l’hygiène ou qui interviendront pendant les canicules.
Selon le panorama 2024 de la DGE, le nombre de transmissions d’entreprises aurait été d’environ 37 000 au cours de l’année dernière.
Reprise, digitalisation et montée en gamme : le trio gagnant
Selon moi, le plus gros gisement d’opportunités se trouve dans la reprise d’entreprise. On parle bien de dizaines de milliers de PME à reprendre chaque année, et très souvent dans des contextes où les entrepreneurs à leur tête n’ont pas de successeur. Ils cherchent donc quelqu’un pour préserver l’emploi de leurs salariés, la clientèle acquise pendant des années, et l’effort qu’ils ont fourni tout au long de leur vie.
Et une fois la société reprise, le potentiel de croissance est souvent énorme, d’autant plus que l’un des leviers les plus simples et efficaces reste la digitalisation. Mettre en place des outils de gestion, automatiser la prise de rendez-vous, optimiser la relation client, travailler le référencement SEO (et j’en connais un rayon à ce propos), etc., la marge de progression est très intéressante dans ce type de business où le niveau de maturité numérique est généralement très bas.
Deuxième levier, la montée en gamme. Dans beaucoup de secteurs, la clientèle est prête à payer plus pour un meilleur service. Réactivité, transparence, qualité perçue, pas besoin de réinventer la roue, vous devez juste faire mieux que les autres.
Une nouvelle image de la réussite entrepreneuriale
Le fantasme du CEO en hoodie en route vers une introduction en bourse a fait son temps. Le vrai luxe, aujourd’hui, c’est la liberté, le contrôle et la rentabilité. Et ça, la gen Z l’a bien compris ! Or, c’est exactement ce que permet un boring business bien choisi.
Le mythe de l’innovation pour l’innovation a produit trop de coquilles vides. Trop de start-ups sans clients, sans flux, sans plan clair pour durer plus qu’une décennie (et encore, je vois large). Ce que l’on voit émerger aujourd’hui, c’est un retour au concret, à la stratégie de terrain et à l’utilisation intelligente de compétences connues et utilisées de tous.
En d’autres termes, lancer ou reprendre un boring business ne se résume pas à choisir la facilité. Au contraire, c’est choisir la solidité, mais aussi miser sur la résilience, la vraie croissance et un modèle qui ne dépend pas des modes. Et puis, par ce biais, vous sécurisez votre avenir d’entrepreneur en profitant d’actifs tangibles et d’un réel rôle dans l’économie française. Oubliez la hype et regardez ce qui fonctionne !
