Vendre un fonds de commerce est une opération économique relativement courante, effectuée chaque année par plusieurs milliers d’entrepreneurs commerçants indépendants.
Qu’est-ce qu’un fonds de commerce exactement ? Pas toujours bien cernée, cette notion représente une fiction juridique qui peut se négocier à prix d’or. Il s’agit en réalité d’un ensemble matériel et immatériel qui forme un tout constitué et organisé pour conquérir et fidéliser une clientèle. Il peut s’agir d’une enseigne, d’un droit au bail, d’une zone de chalandise particulière… Autrement dit, tout ce qui permet une exploitation la plus performante possible de l’activité commerciale afin d’obtenir les meilleurs résultats économiques possibles.
Vendre un commerce signifie obligatoirement vendre un fonds de commerce, qui constitue généralement la part la mieux valorisable de l’opération de cession. Or cette vente est relativement complexe d’autant plus qu’elle intègre des éléments incorporels qu’il convient de définir, de lister et surtout d’évaluer. Sans oublier les obligations légales qui s’appliquent en matière de formalisme applicable à la vente, ou aux formalités d’enregistrement de la cession. Agence Juridique fait le point pour vous aider à y voir clair.
De quoi se compose un fonds de commerce ?
Avant de se lancer dans la vente d’un fonds de commerce, mieux vaut être certain de ce qu’il englobe, afin de connaître précisément ce qui est cédé.
Le fonds de commerce est composé d’un ensemble d’éléments corporels (matériels) et incorporels (immatériels). Au titre des éléments matériels figurent le mobilier, les outils de présentation ou de vente, le stock, le matériel publicitaire etc. Les éléments incorporels sont généralement les plus délicats à déterminer: il s’agit principalement de la clientèle (sans clientèle pas de fonds de commerce) régulière ou potentielle, du droit au bail, de l’utilisation d’une marque et d’un nom commercial, d’un fichier client, des contrats de travail des salariés, des droits relatifs à la propriété intellectuelle, des logiciels métier…
Mais il est faux de penser que tout élément immatériel du commerce ou de son exploitation fait partie du fonds de commerce. Ainsi, les créances et dettes ne sont pas transmis, ni même la comptabilité de l’exploitant cédant (la comptabilité reste la propriété du cédant même s’il doit permettre la consultation durant 3 ans de ces documents). Par ailleurs, le droit de terrasse d’un restaurant étant accordé à titre personnel (on parle d’un droit intuitu personae), celui-ci ne peut être cédé à l’acquéreur qui devra de son côté effectuer la démarche pour l’obtenir.
Attention: les dettes peuvent être intégrées à la cession du fonds de commerce en cas de solidarité fiscale ou encore en cas de manquements aux obligations de l’acquéreur. |
Délimiter les contours de la cession en listant les composantes du fonds de commerce
Comme dans le cadre de toute vente soumise au droit contractuel, il est indispensable de s’entendre sur un prix et une chose, à savoir l’objet de la vente qui doit être précisément délimité. C’est pourquoi, un inventaire librement établi par les parties devra être réalisé, signé et annexé au projet de vente. Celui-ci doit être exhaustif et le plus complet possible, afin notamment d’éviter l’intervention du juge des référés qui intervient en cas de conflit au moment de la cession pour apprécier souverainement l’intégration d’un élément au fonds de commerce cédé. La jurisprudence considère à ce sujet que seuls les éléments indispensables à l’existence d’une clientèle sont à inclure à la cession du fonds. Autrement dit, cette notion restrictive peut s’avérer pénalisante, d’où l’intérêt d’un listing précis sur lequel les parties s’entendent expressément.
A noter que certains éléments généralement exclus peuvent être intégrés dans le cadre de la liberté contractuelle à la cession du fonds de commerce, comme par exemple les actions juridictionnelles en cours.
L’obligation d’information du cédant à l’égard des salariés
Il pèse sur le vendeur du fonds de commerce une obligation légale d’information à l’égard des salariés de l’entreprise dont le fonds de commerce est cédé. Cette obligation ne vaut que lorsque l’entreprise dispose d’un effectif inférieur à 249 salariés, et doit être remplie au plus tard 2 mois avant la signature du contrat de vente définitif à travers tout moyen permettant de prouver la bonne transmission de l’information à date certaine (signature d’un registre, courrier RAR…). Cette obligation vise à permettre aux salariés de formuler par priorité une offre d’acquisition pour le fonds de commerce, tout en étant tenus d’une obligation de discrétion à l’égard des tiers.
Bon à savoir: lorsque la cession est effectuée en faveur d’un conjoint, ascendant ou descendant, l’obligation d’information ne vaut plus. |
La vente doit alors être finalisée dans un délai compris entre 2 mois – 2 ans et 2 mois suivant l’information, faute de quoi une nouvelle information sera rendue nécessaire. Le non respect de cette obligation d’information peut être sanctionné par une amende au taux forfaitaire de 2% du prix de la cession, sans pouvoir annuler la vente elle-même.
Comment réaliser la vente à proprement parler ?
Dans le respect du droit contractuel, la cession est généralement réalisée en deux étapes : une promesse de vente (ou compromis) valant engagement des parties sous conditions suspensives, et une signature définitive de l’acte de vente.
La promesse de vente nécessite que les parties se soient entendues a minima sur l’objet (donc sur les contours du fonds de commerce) ainsi que sur le prix. Il est possible de prévoir le versement d’indemnités en cas de défaillance de l’une ou l’autre des parties.
De son côté l’acte de vente est soumis aux dispositions du Code de commerce et représente un acte de vente classique devant mentionner un certain nombre de mentions légales: prix, identité des parties, désignation de l’objet de la vente, résultats d’exploitation sur 3 exercices, état des inscriptions et nantissements etc. A noter qu’une inexactitude d’une mention obligatoire n’entraîne pas de plein droit la nullité mais simplement une diminution du prix contrairement à l’omission pure et simple d’une mention obligatoire.
Quelles démarches après la vente du fonds de commerce ?
La cession du fonds peut être réalisée par acte notarié ou par simple acte écrit sous seing privé. L’acquéreur doit néanmoins faire enregistrer celui-ci à la recette des impôts du lieu où se trouve le fonds cédé. Il prend également en charge les frais relatifs à cette opération, sauf disposition contraire négociée et inscrite au contrat de vente.
Depuis la loi Macron, il n’est plus nécessaire de publier une annonce dans un journal d’annonces légales en cas de cession d’un fonds de commerce. La publicité est uniquement réalisée par le BODACC (non obligatoire en cas d’acte notarié), avec un délai d’opposition des créanciers de 10 jours. Ce n’est qu’une fois passé ce délai d’opposition au règlement que la transaction pourra être conclue et les fonds correspondant à la cession transférés.
Le cédant doit de son côté clôturer ses comptes et déclarer la cession du fonds de commerce aux services fiscaux dans les 60 jours suivant la publication au BODACC ou la signature.
Enfin, un état des lieux est dressé lors de la prise de possession du local par l’acquéreur. Un état des lieux qui revêt une importance capitale en cas de conflit ultérieur entre les parties. D’où l’intérêt de faire appel à un spécialiste expérimenté pour représenter ses intérêts.