La création d’entreprise en parallèle d’une activité salariée est de plus en plus courante. En effet, deux créations d’entreprises sur dix émanent de salariés en activité. Face à ce nombre croissant de salariés créateurs, le législateur a créé un cadre légal favorable afin de faciliter les projets entrepreneuriaux. Néanmoins, les contrats de travail qui lient les salariés à leurs employeurs sont régis par des règles spécifiques qui peuvent, dans certains cas, faire entrave à la création d’entreprise. Il convient donc, dans un premier temps, de s’assurer que le salarié ne risque pas de perdre son emploi.
Les restrictions émanant du contrat de travail et de la loi
En principe, la liberté du commerce et de l’industrie est un droit fondamental reconnu à tout individu. Il s’agit d’un droit constitutionnel. Toutefois, toute liberté comporte certaines restriction par l’effet de la loi ou par la volonté des parties. En l’occurrence, cette volonté s’exprime juridiquement par l’intermédiaire du contrat de travail où l’employeur avec l’accord du salarié peut l’assortir de certaines restrictions.
En effet, le contrat de travail peut être assorti selon les cas d’une clause d’exclusivité ou de non-concurrence restreignant la possibilité pour un salarié de créer sa société en parallèle de son contrat de travail.
La clause d’exclusivité
La clause d’exclusivité dans un contrat de travail vise à restreindre la faculté pour la salarié d’exercer une autre activité (salarié, entrepreneuriale…). Ainsi, l’employeur obtient de la part du salarié qu’il travail exclusivement pour son compte et renonce à exercer d’autres activités professionnelles de quelques manières que ce soit.
Néanmoins, cela va dépendre de la rédaction de la clause : il se peut que l’exclusivité ne concerne que les activités salariées. Or, un dirigeant d’entreprise n’est pas un salarié au sens juridique du terme. Dans ce cas spécifique, la clause sera donc sans effet.
Pour être valable, la clause d’exclusivité doit répondre à plusieurs conditions :
- être indispensable à la protection d’un intérêt légitime de l’entreprise
- être justifiée par la nature des fonctions du salarié
A noter que la clause d’exclusivité n’est pas valable dans un contrat de travail à temps partiel.
En cas de non respect de ces conditions, la clause d’exclusivité sera réputée non écrite c’est à dire que le contrat de travail restera valable mais que la clause ne trouvera pas application.
Si la clause est valable, son non respect constitue un motif de licenciement pour l’employeur. En effet, le fait pour le salarié de ne pas respecter les clauses d’un contrat de travail est constitutif d’une faute pouvant aboutir à un licenciement.
La clause de non-concurrence
La clause de non- concurrence est une clause visant à empêcher le salarié de concurrencer son ancien employeur notamment en l’empêchant de travailler pour ses concurrents Cette clause peut prendre effet pendant toute la durée du contrat travail voire subsister en cas de rupture pendant une durée déterminée. Ainsi, en présence d’une clause de non-concurrence, le salarié ne pourra pas créer une entreprise susceptible de concurrencer son ancien employeur pendant la durée déterminée, sur un territoire limité mentionné dans la clause.
Toutefois, la clause de non concurrence pour être valable doit répondre à certaines conditions de fond et de forme. Elle doit être :
- justifiée par des intérêts légitimes à l’entreprise
- limitée dans le temps et dans l’espace
- assortie d’une contrepartie financière spécifique (généralement 30% de la rémunération brute)
- tenir compte de l’emploi du salarié et de sa capacité à retrouver un emploi
Si ces conditions ne sont pas remplies, la clause sera déclarée nulle : l’employeur ne pourra pas reprocher au salarié de ne pas respecter la clause.
A défaut de respect de la clause valable, le salarié pourra être poursuivi en concurrence déloyale et/ou licencier pour faute.
Le devoir de loyauté
Le devoir de loyauté est issu de l’exigence de bonne foi en matière contractuelle. Même en l’absence de clauses spécifiques, le salarié est tenu de ne pas nuir à l’activité de son employeur. Il s’agit notamment du détournement de clientèle, dénigrement des produits et services proposés, sollicitation des salariés de l’entreprise…
En tout état de cause, le devoir de loyauté ne fait pas obstacle à la création d’une entreprise en parallèle de l’activité d’un salarié à condition de ne pas faire entrer en collision son entreprise avec celle de l’employeur par des procédés déloyaux.
Déontologie propre à certaines activités réglementées
La réglementation de certaines activités empêche le cumul d’activités pour des raisons de déontologie. il s’agit notamment des avocats, notaires, juges…
Il convient donc, en cas d’exercice d’une activité réglementée, de se renseigner avant de lancer son entreprise.
Le droit de devenir associé
Bien que la création d’une entreprise en tant que dirigeant en parallèle d’un contrat de travail peut se heurter aux différentes règles précitées, le salarié peut toujours devenir associé ou actionnaire de la société. Ainsi, il ne sera pas dirigeant mais pourra bénéficier des fruits de la société créée au moyen de dividendes et participer au vote des décisions dévolues aux actionnaires.
Il s’agira toutefois de s’assurer de ne pas être qualifié de dirigeant de fait (c’est à dire non nommé formellement par les statuts mais exerçant de manière effective les fonctions de dirigeant)
Création de l’entreprise en tant que salarié
Maintenant les différentes restrictions à la création d’entreprise envisagées, il s’agit de se pencher sur les dispositifs relatifs au créateur salarié.
Congé pour reprise ou création d’entreprise
L’entrepreneur salarié peut demander à son employeur un congé d’une durée de 12 mois renouvelable une fois pour la création ou la reprise d’entreprise sous certaines conditions. Pour en bénéficier le salarié doit :
- bénéficier de 24 mois minimum d’ancienneté dans l’entreprise
- respecter un délai de carence de 3 ans entre deux congés de création d’entreprise
- obtenir l’accord de son employeur en mentionnant la date de départ, la durée envisagée, l’activité de l’entreprise créée ou reprise. Ce dernier dispose d’un délai de 30 jours pour donner sa réponse. A l’issu de ce délai, son silence vaut acceptation.
Evidemment, ce congé, pendant toute sa durée, ne donne pas droit à rémunération du salarié. Il devra compter sur ses propres deniers ou les revenus générés par son entreprise nouvellement créée.
Enfin, à l’issu du congé, l’employeur aura pour obligation de réintégrer le salarié si ce dernier le souhaite.
Exonération de cotisations sociales à destination des salariés entrepreneurs
Dès lors, le salarié créateur d’entreprise, s’il se rémunère, sera soumis aux cotisations sociales de sa rémunération de salarié et aux cotisations sociales de son activité de dirigeant. En fonction de la forme de société choisie, il pourra être amené à cotiser auprès de deux organismes différents.
Afin de palier à cette situation peu attrayante, la loi permet au salarié entrepreneur de bénéficier d’une exonération de cotisations sociales pour les 12 premiers mois dans la limite de 120% du SMIC. Toutefois, pour bénéficier de l’exonération le salarié doit :
- justifier 910 heures d’activité en tant que salarié durant l’année précédent la création ou la reprise de l’entreprise
- rester salarié pour au minimum 455 heures l’année suivant la création ou la reprise de l’entreprise.
A noté que les revenus générés seront tout de même soumis aux prélèvements sociaux (CSG/CRDS) à un taux de 15,5%
Éviter les doubles cotisations en privilégiant les dividendes
Enfin, il est tout à fait envisageable de privilégier le versement de dividendes en fin d’année pour « esquiver » les cotisations sociales. En effet, les bénéfices générés peuvent être distribués sous la forme de dividendes. Ils seront soumis aux prélèvements (15,5%) sociaux mais exonérés de cotisations sociales (sauf pour les gérants associés d’EURL et les gérants majoritaires de SARL).
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