S’associer avec un proche : bonne idée ou bombe à retardement ?

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Dans le monde de l’entrepreneuriat, on entend souvent que s’associer avec un ami, un parent ou même un compagnon de vie, c’est l’idée du siècle. Après tout, qui mieux qu’un proche pour partager votre projet, votre vision et votre envie de changer les choses à votre manière ? Sauf que derrière cette collaboration à première vue évidente se cache parfois une bombe à retardement. Et je vous parle ici en tant qu’entrepreneuse aguerrie, qui a vu passer bien des entreprises. Alors, je peux vous le dire sans détour, s’associer avec un proche est un pari risqué. Si ça peut faire naître une activité florissante, ça peut aussi ruiner à la fois votre travail et vos liens familiaux ou amicaux.

Mais du coup, faut-il foncer ou fuir ? Je vous propose d’analyser ensemble les coulisses de ce choix particulier.

Le rêve d’un projet commun : quand la relation devient un moteur

S’associer avec un proche part d’une idée positive. On imagine un avenir où la collaboration est fluide, où les décisions se prennent dans une ambiance détendue, et où les valeurs sont partagées sans même avoir besoin d’en discuter. Ce rêve, je l’ai vu habiter de nombreux entrepreneurs au cours de mon existence, des couples, des familles, des amis de longue date.

Et c’est compréhensible ! Ce cadre rassurant est un vrai levier de motivation. Dans un environnement incertain comme lorsqu’on démarre une entreprise ou qu’on change de situation professionnelle, pouvoir compter sur quelqu’un dont on est proche est une excellente chose. Et puis, vous connaissez ses réactions, ses compétences, son niveau d’exigence. Autant dire que ça limite les imprévus durant les premières années de votre activité.

Nombreuses sont d’ailleurs les entreprises familiales à avoir bâti leur succès sur cette relation de confiance. Et dans ces cas de figure, il y a fort à parier que leur force venait de cette intimité professionnelle rare.

Toutefois, je suis à peu près sûre que ce rêve ne suffit pas. Parce que l’entrepreneuriat ne pardonne pas les zones d’ombre. Or, c’est souvent là que les ennuis commencent…

L’émotionnel, un moteur ou un poison silencieux

Quand on monte une entreprise avec un proche, les règles du travail se mélangent évidemment avec la vie privée. Sauf que, malheureusement, ledit mélange peut vite devenir toxique. Et je ne vous parle pas de mauvaise volonté, mais plutôt d’une pollution émotionnelle qu’on ne voit pas venir.

On prend des décisions pour ne pas blesser. On évite des problèmes pour préserver l’équilibre de la relation. On accepte un comportement qu’on n’aurait jamais toléré chez un autre collaborateur. Bref, la liste des compromis éventuels est encore très longue.

C’est justement ce flou entre vie pro et vie perso qui devient un véritable risque, et encore plus quand l’entreprise commence à grossir. Vous devez faire face à de nouveaux clients, à des impératifs (marketing, gestion, etc.) auxquels vous n’avez jamais été confronté dans votre relation. Et pendant que vous vous battez pour garder le cap, les tensions personnelles s’infiltrent dans vos réunions, vos emails, vos décisions.

Tout ça, c’est sans parler des non-dits, toutes ces informations qu’on garde pour soi « par respect », « par amour », ou « pour ne pas gâcher l’ambiance ». Pourtant, en matière d’entrepreneuriat, une mauvaise communication est annonciatrice d’une chute de la performance au sein de l’entreprise. C’est inévitable.

Voilà pourquoi j’insiste sur le caractère impératif de fixer un cadre professionnel clair. Et celui-ci passe par un pacte d’associés, des rôles définis, des responsabilités identifiées, des horaires bien cadrés, etc. Peu importe que vous soyez amis depuis l’école primaire, que vous viviez ensemble, ou même que vous ayez des enfants en commun, plus vous serez rigoureux, plus vous protégerez à la fois votre activité et votre relation.

Et si ça tourne mal : l’impact souvent sous-estimé

Évidemment, personne ne monte une société avec un proche en se disant que ça finira mal. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut faire l’autruche. Ce sont des choses qui arrivent et, hélas, les dégâts sont souvent bien plus violents que dans le cadre d’une association classique. Parce que vous ne perdez pas seulement un collègue ou un associé, vous perdez aussi un frère, un ami, un amour, etc.

Se lancer dans l’entrepreneuriat exige de ne pas se montrer naïf. En vous associant avec un proche, vous prenez le risque d’une séparation brutale. Ce n’est pas pour rien que de nombreuses personnes peuvent ne plus parler pendant des dizaines d’années, et ce, à cause d’une banale dispute sur un projet commun.

Et n’imaginez pas sauvegarder votre activité dans une telle situation, parce qu’en toute franchise, quand les choses vont mal, les clients le voient.

Alors, non, je ne pense pas être pessimiste en vous disant de d’abord penser à la fin avant même de commencer. C’est plutôt du réalisme. Prévoir une clause de sortie, se poser les bonnes questions sur la répartition des parts ou sur les conditions de départ, autant de sujets qui peuvent être douloureux sur le moment, mais qui sont salvateurs quand les choses se compliquent.

Dans certaines structures, les experts recommandent un médiateur extérieur pour accompagner les débuts d’une association entre proches.

Comment savoir si s’associer avec un proche est une bonne idée ?

Vous vous demandez si vous pouvez vous associer avec votre frère ou votre mari/femme ? Désolée, il n’y a pas de réponse universelle. Vous vous en doutez, ce qui fonctionne pour les uns ne fonctionne pas nécessairement pour les autres. Néanmoins, certains signaux doivent vous alerter.

Déjà, si vous avez l’habitude de rencontrer des tensions dans le cadre de votre relation actuelle, si vous communiquez mal dans les moments de stress, ou si vous avez des visions très différentes du travail, je vous le dis tout de suite, vous associer n’est pas une bonne idée.

À l’inverse, si vous arrivez à vous parler franchement, si vous avez des compétences complémentaires, ou si vous avez déjà traversé des problèmes complexes sans vous déchirer, cette collaboration peut très probablement fonctionner. Mais là encore, attention à bien poser les bases, à rédiger ce fameux pacte d’associés, et à garder une part d’indépendance dans vos missions respectives.

De même, ne négligez pas l’éducation entrepreneuriale, qui est capitale à ce niveau. En effet, trop d’entrepreneurs se lancent avec un proche sans rien savoir du droit des sociétés, des enjeux fiscaux, de la gestion, etc. Ils improvisent, se forment sur le tas, et finissent submergés par tout ce qu’ils doivent gérer.

Je vous recommande donc vivement de prendre le temps de vous former, même seul, pas uniquement pour votre entreprise, mais surtout pour votre relation. Parce que dans ce type de projet, c’est souvent la vie qui donne des leçons, sauf que parfois, elles arrivent un peu tard.

 

En bref, s’associer avec un proche est l’un des choix les plus engageants de votre parcours entrepreneurial. Oui, ça peut propulseur votre entreprise vers le succès, mais ça peut aussi la briser. Ce n’est donc pas une bonne idée systématique, ni même une erreur à éviter à tout prix. Mais vous devez prendre cette décision en connaissance de cause, en préparant le terrain, en acceptant les risques et, surtout, en protégeant le lien qui vous unit. Parce qu’un projet, aussi beau soit-il, ne vaudra jamais plus que la relation que vous risquez de perdre.

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Ludivine RETOURNE
Entrepreneuse depuis 2007, je baigne depuis 18 ans dans le marketing digital (storytelling, copywriting, rédaction) et le référencement. Mais c’est en travaillant de nombreuses années pour des professionnels de la création d'entreprise que je suis devenue, sans m'en rendre compte, une encyclopédie de l'entrepreneuriat. Sur ce blog, je partage avec vous mes conseils et astuces, mais aussi mes observations, pour développer votre activité sans vous prendre la tête ! Retrouvez-moi sur Linkedin

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