À l’heure qu’il est, la mobilité en entreprise n’est plus qu’un simple sujet logistique. C’est en effet devenu un enjeu lié au climat, à la performance sociale et à la compétitivité. Mais il est évident que c’est l’urgence environnementale qui pousse les entreprises françaises à rapidement revoir leurs plans de mobilité. Et tant mieux ! Car décarboner la mobilité, c’est aussi s’engager pour améliorer le quotidien des salariés, répondre à de nouvelles attentes sociétales et anticiper les contraintes réglementaires.
Mais alors, comment faire pour décarboner la mobilité en entreprise ? Quels modes de transport privilégier ? Quelles solutions durables mettre en place sans exploser le budget de la société ? Et plus que tout, comment transformer cette transformation en opportunités pour votre entreprise ? Je vous propose d’entrer dans le vif du sujet.
Quels sont les enjeux de la mobilité en entreprise ?
Avant de chercher comment décarboner, il faut poser les bases. La mobilité en entreprise concerne l’ensemble de ces déplacements professionnels :
- trajets domicile-travail ;
- déplacements inter-sites ;
- rendez-vous clients ;
- livraisons ;
- interventions ;
- etc.
Inutile de dire que tout cela peut peser très lourd.
En France, on estime que près de 30 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent du secteur des transports. Or, la voiture individuelle reste de loin le mode de transport le plus utilisé par les salariés, surtout en dehors des grandes métropoles. Le résultat est sans appel avec un bilan carbone explosif, des routes saturées aux heures d’embauche et de débauche, et une pression toujours plus forte sur les entreprises.
C’est donc pour pallier les manquements de nombreux secteurs d’activité que la loi d’orientation des mobilités (LOM) a vu le jour, en imposant désormais aux entreprises de plus de 50 salariés sur un même site d’intégrer un PDME (plan de mobilité employeur) dans leurs négociations obligatoires.
Et ce n’est que le début, car de nouvelles réglementations, en particulier sur les zones à faibles émissions (ZFE), risquent de progressivement bannir les véhicules thermiques des centres urbains. En d’autres termes, si vous ne repensez pas la mobilité dans votre organisation, vous allez droit dans le mur en termes de coûts, d’image, de recrutement ou même de rétention des talents. Eh oui ! Tout est lié.

Selon le baromètre “Mobilité et entreprises” d’Alphabet France et de l’IFOP (2024), 55 % des actifs français déclarent bénéficier de solutions ou de services de mobilité via leur société.
Comment agir pour décarboner les déplacements domicile-travail ?
De toute la liste que j’ai évoquée précédemment, le trajet domicile-travail reste sans doute le nerf de la guerre. Néanmoins, c’est aussi celui sur lequel il est possible d’agir le plus rapidement.
Premier levier, le forfait mobilités durables. Créée par la loi LOM, cette mesure permet à l’employeur de verser jusqu’à 800 euros par an (depuis 2024) à chaque salarié qui utilise des modes de transport durables pour venir au travail (vélo, covoiturage, transports en commun, véhicules électriques partagés, etc.).
Ce forfait mobilités est un outil d’autant plus intéressant qu’il est exonéré de cotisations sociales et d’impôts pour le salarié. Il s’agit donc d’une vraie solution d’incitation écologique, simple à mettre en œuvre, et gagnant-gagnant pour toutes les parties. Malheureusement, peu d’entreprises françaises l’utilisent encore. Je vous conseille par conséquent de commencer par là si vous cherchez à amorcer votre transition.
Deuxième levier, les infrastructures. Mettre un parking à vélos sécurisé, installer des bornes de recharge pour véhicules électriques, permettre aux salariés de prendre une douche ou de stocker leur casque, etc., autant de détails qui changent les pratiques.
Troisième levier, le télétravail. Moins de trajets, c’est forcément moins d’émissions carbone. Et même si tous les métiers ne s’y prêtent pas, intégrer une part de télétravail dans votre organisation permet de mécaniquement réduire l’impact carbone de votre mobilité globale.
Mais la sensibilisation est aussi un point capital de vos actions, et à ce titre, vous devez valoriser les initiatives. Proposez un service de covoiturage entre collègues, offrez un vélo d’entreprise, proposez un accompagnement pour passer à la voiture électrique. Les solutions existent ! À vous de les adapter à votre entreprise et à son budget.
Comment repenser les véhicules professionnels et déplacements liés au travail ?
Au-delà des déplacements domicile-travail, la mobilité professionnelle au sens large représente une part non négligeable du bilan carbone de votre entreprise.
Le premier poste que vous devez examiner concerne la flotte de vos véhicules. Si vous avez des voitures de fonction ou des utilitaires, il y a fort à parier que vous puissiez revoir votre copie pour les adapter aux enjeux de la transition écologique. Entre le bonus écologique, la prime à la conversion, l’exonération de TVS pour les véhicules électriques, etc., vous disposez de plusieurs aides pour verdir votre flotte.
Cela étant dit, il ne suffit pas d’électrifier pour gagner la partie. Vous devez aussi rationaliser en mutualisant par exemple les véhicules, en optimisant les tournées et en limitant les déplacements inutiles. Chaque litre de carburant évité représente autant d’euros économisés et d’émissions carbone en moins.
Le second poste à passer en revue est celui des déplacements longue distance. Là aussi, vos choix ont un impact significatif. Est-ce qu’un rendez-vous peut se faire en visio ? Est-ce que le train peut remplacer l’avion ? Pouvez-vous regrouper des réunions pour éviter plusieurs allers-retours ? Toutes ces questions doivent faire partie de vos pratiques managériales.
Enfin, pensez à intégrer la mobilité durable dans vos appels d’offres. Si vous travaillez avec des prestataires, exiger des engagements en matière de transport durable est un levier très souvent sous-exploité, malgré sa grande efficacité.
Comment construire un plan de mobilité sur mesure ?
Réfléchissez votre plan de mobilité (PDME) comme une opportunité stratégique pour votre entreprise. Enfin, ça ne peut être le cas que s’il est bien pensé.
Dans tous les cas, commencez par faire un diagnostic ou un état des lieux de votre mobilité. Où habitent vos salariés ? Quels sont leurs modes de transport actuels ? Quelles sont les contraintes locales (transports publics, accessibilité, offres de covoiturage, infrastructures) ? Quels sont les usages professionnels des véhicules ? Ce bilan de votre mobilité est inévitable pour vous permettre de construire un plan d’action réaliste et cohérent.
De même, associez vos salariés au processus, car ce sont eux qui vivent les trajets au quotidien. C’est en les écoutant que vous identifierez des solutions durables et concrètes, en plus de faciliter leur adhésion à votre plan de mobilité.
Quoi qu’il arrive, fixez des objectifs clairs et réalistes. Ne mettez pas la charrue avant les bœufs. Réduction du nombre de voitures en solo, augmentation de l’usage du vélo, montée en puissance du forfait mobilités durables, baisse des émissions de CO2, etc., suivez des indicateurs progressifs. En plus, vous pourrez communiquer sur vos chiffres et valoriser vos résultats, ce qui en fera au passage un levier de marque employeur.
Et si vous en ressentez le besoin, faites-vous accompagner. De nombreux professionnels et services proposent des outils pour vous aider à piloter votre plan de mobilité.
Comme vous le voyez, décarboner la mobilité en entreprise n’est pas qu’une affaire d’écologie. On parle aussi de compétitivité, d’image, de coût et de bien-être au travail. Et puis, en étant attentif à cet enjeu, vous prouvez votre responsabilité. Certes, il y a des freins, des contraintes et des habitudes bien ancrées, mais il y a surtout des solutions concrètes, rentables et durables à votre portée.